Cet article est publié en partenariat avec Quora, plateforme sur laquelle les internautes peuvent poser des questions et où d’autres, spécialistes du sujet, leur répondent.
La question du jour: «L’A380 est-il en train de renaître? De plus en plus de compagnies semblent vouloir le remettre en service»
La réponse de Philippe Bleus:
Ça dépend de ce que vous appelez «renaître». Si c’est «être remis en production», je pense bien qu’on peut l’oublier. Par contre, si vous pensez à une remise en service de certains de ces appareils, c’est en effet en train de se faire (pour certaines compagnies) ou de se planifier (pour d’autres).
À ma connaissance, et outre le fait qu’Airbus a arrêté la production de l’A380 (ce qui est déjà suffisant), toutes les compagnies aériennes qui remettent (ou vont remettre) leurs A380 en service annoncent clairement qu’elles ne remettront qu’une partie de ceux-ci dans le ciel.
Abonnez-vous gratuitement à la newsletter quotidienne de Slate.fr et ne ratez plus aucun article!
Une brève recherche sur internet fournira des détails relatifs aux intentions et au planning de plusieurs compagnies aériennes. Les projets s’étalent en général sur le moyen terme.
Par contre, l’arrêt de la production d’un modèle ne signifie pas une disparition subite et immédiate de celui-ci (sauf pendant le creux généré par le Covid) et on s’accorde généralement pour dire qu’on verra encore voler des A380 pendant cette décennie.
Quel flop pour un avion extraordinaire, apparemment issu d’une analyse erronée d’Airbus sur le modèle de développement du trafic aérien d’aujourd’hui et de demain. S’il n’y a pas eu d’erreur (c’est peu probable), nous dirons que les faits ont évolué d’une façon différente (opposée, en fait) de celle qu’Airbus avait prévue.
De facto, c’est la vision de Boeing qui s’est révélée correcte, c’est-à-dire la multiplication des vols par bimoteurs très très long-courriers (B787, A350, 777X) et non un trafic aérien de très gros porteurs basé sur des hubs.
Première accélération
Le 21 octobre 2021, dans un article écrit pour Capital, la journaliste Claire Domenech donne l’information suivante en citant CNN: Singapore Airlines a annoncé qu’à partir de novembre 2021, l’A380 effectuera des rotations d’une heure dans chaque sens, entre Singapour et Kuala Lumpur, en Malaisie. L’A380 sera donc utilisé à cette occasion en court-courrier, de loin sa route la plus courte!
La même compagnie va aussi réutiliser ses A380 sur certains vols aller-retour entre Singapour et Londres à partir de la mi-novembre 2021 –tant pour des besoins opérationnels qu’en raison de l’attrait des passagers pour l’A380, nombre d’entre eux réservant pour voler spécifiquement dans cet avion. Voilà donc un facteur qui ne semble pas encore avoir été pris en compte et qui peut subitement jouer un rôle inattendu.
British Airways va remettre en service des A380 au départ de Londres vers certaines destinations européennes, afin de permettre aux équipages de se familiariser de nouveau avec l’appareil avant la reprise des vols transatlantiques de cet avion. Ce sera donc également des vols courts, comme celui évoqué pour Singapore Airlines. Indépendamment, Londres-Francfort et Londres-Madrid sont déjà proposés en A380.
Deuxième accélération
British Airways a remis ses douze appareils en service et cherche à en acquérir six (!) de plus, mais, étonnamment n’a pas pu trouver d’accord sur les prix des A380 envisagés. Ça va peut-être revenir dans l’actualité: il est surprenant que des compagnies qui veulent se débarrasser de leur super jumbo fassent les difficiles sur les prix.
Lufthansa, un des plus farouches adversaires de la remise en service et qui avait juré qu’on ne l’y prendrait plus, remettra quatre ou cinq de ses A380 en service à l’été prochain.
Bilan chiffré
Emirates Airlines: 99 sur 123 volent.
Etihad Airways: 4 seront remis en service vers Londres l’été prochain.
Korean Air: 5 sur 10 volent.
Qantas: 7 en service sur 12.
Qatar Airways: 8 sur 10 volent.
Singapore Airlines: 11 sur 24 volent.
Asiana Airlines: 4 sur 6 en service.
All Nippon Airways: 2 sur 3 volent.
Une cinglante revanche?