
Cerise sur le gâteau pour la Quinzaine des cinéastes qui, avant de clore sa 55e édition, recevait, jeudi 25 mai, Quentin Tarantino, pour une carte blanche suivie d’une conversation autour de son dernier livre, Cinéma spéculations (Flammarion, 448 p., 25 euros), où l’auteur de Pulp Fiction, Kill Bill et Once Upon a Time in… Hollywood, troquant la caméra pour l’exercice critique, revient sur les films des années 1970 qui l’ont vu grandir.
Puisé dans ce riche corpus, le film surprise projeté dans la foulée était Légitime violence (1977), de John Flynn, un vigilante movie (récit de vengeance personnelle) méconnu, sec et musclé, de ceux que le réalisateur affectionne tant – au point d’avoir baptisé sa société de production « Rolling Thunder Pictures », d’après le titre original, Rolling Thunder.
En le présentant sur scène, le cinéaste cinévore, annonçant en grande pompe une projection « en pellicule 35 mm », a demandé à la salle de se « défranciser » (unfrench yourselves) et donc de réagir « quand [ils auraient] envie de réagir, de crier quand [ils auraient] envie de crier ».
Limite infranchissable
La discussion était portée par la faconde volubile et intarissable d’un Tarantino en grande forme, ne craignant pas de répondre dans les grandes largeurs aux questions posées par le délégué général de la manifestation, Julien Rejl. L’analyse en règle du film présenté, riche en scènes d’action corsées, a naturellement dévié sur la question de la violence, que le cinéaste a souvent abordée dans ses propres films, en pur artificier.
« Oui j’aime les films violents, a-t-il affirmé. Comme d’autres personnes aiment les comédies musicales ou les films burlesques. Je trouve cela extrêmement cinégénique, ça m’éclate, et ce ne sont jamais que des histoires, à apprécier en tant qu’histoires. » « J’ai souvent vu des films gore bien au-delà du raisonnable, admet-il volontiers, mais les seules fois où j’ai ressenti un problème avec la violence, c’est parce qu’elle était mal faite. »
« Il est important de comprendre qu’au cinéma il s’agit avant tout de faire semblant, a-t-il expliqué. Nous sommes juste des enfants qui jouons. Ce n’est pas du vrai sang à l’écran. Les gens ne se font pas vraiment mal – parfois si, parce qu’ils sont trop zélés, mais ce n’est pas le but. »
En tant que cinéphile, l’invité pose néanmoins une limite infranchissable, quant au spectacle de la mise à mort des animaux, « quelque chose qui s’est beaucoup fait à une époque dans les films européens ou asiatiques ». « Je ne paie pas ma place pour voir une mort réelle à l’écran, a-t-il déclaré, se montrant en l’espèce intraitable. Que ce soit un chien, un lama ou même une mouche. »