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selon Secouristes sans frontières, « les autorités auraient pu accepter un peu plus d’aide »

Pourquoi tant d’offres d’aide sont-elles restées lettre morte ? Malgré l’ampleur des destructions et le lourd bilan toujours provisoire du séisme survenu dans la nuit de vendredi 8 à samedi 9 septembre au Maroc, qui approche des 3 000 morts, seules quelques équipes ont été autorisées à participer aux secours. Beaucoup d’autres attendent encore l’aval de Rabat.

« Les autorités marocaines sont en train de cibler les besoins sur place. A l’ambassade, ils nous ont demandé de répondre à des questions précises, notamment sur ce que nous sommes en mesure d’apporter comme potentiel humain et matériel. Nous avons répondu et nous attendons leur feu vert », expliquait dimanche au Monde, Dominique Angeloni, responsable de l’équipe de Secouristes sans frontières qui s’apprêtait à partir. L’ONG française a finalement renoncé, le lendemain. Arnaud Fraisse, son fondateur et responsable de la communication, explique pourquoi.

Pourquoi avez-vous renoncé à intervenir au Maroc ?

Arnaud Fraisse : Nous avons prévenu hier soir l’ambassade du Maroc que nous renoncions à notre proposition, parce que notre fonction, c’est d’intervenir dans l’extrême urgence pour retrouver des survivants, or nous estimons qu’après quatre jours, avec ce type d’habitat et de tremblement de terre, il y a peu de chances que nous en retrouvions.

Notre mission n’est pas d’extraire des corps sans vie, ce qui nécessite de respecter les us, les coutumes et les croyances locales. Les secouristes marocains le font beaucoup mieux que nous. Nous préférons donc les laisser faire. Notre rôle, c’est la recherche de personnes ensevelies vivantes, avec des chiens ou des moyens matériels. Cela nous attriste parce que nous savons que nous aurions pu sauver des vies dans les quarante-huit premières heures.

Pour quelle raison vous n’avez pas obtenu l’autorisation de jouer ce rôle ?

Il y en a certainement beaucoup. Je ne sais pas quelle est la plus plausible. Nous avons certainement fait les frais de la brouille franco-marocaine. Les ONG sont souvent confrontées à ce genre de situation. Soit le pays fait appel à l’aide humanitaire internationale, comme ce fut le cas en Turquie, après le séisme de février, soit on passe par le canal diplomatique en faisant une proposition à l’ambassade du pays concerné, qu’elle est libre d’accepter ou non. En parallèle, nous prenons contact avec le ministère des affaires étrangères français pour l’informer et connaître sa position de principe sur l’évènement.

Beaucoup d’autres sont dans le même cas que nous. Une centaine d’équipes de secours ont proposé leur aide, et les autorités marocaines ont fait leur choix. C’est dommage, mais nous devons l’accepter.

Etes-vous souvent confrontés à ce genre de situation ?

Il nous est arrivé d’essuyer des refus, par exemple après le séisme de 1988 en Arménie. Erevan a refusé l’aide des ONG, mais a accepté celle des Etats. La Sécurité civile française a donc pu envoyer un contingent. A l’inverse, après le tremblement de terre de 1993 à Latur, en Inde, les autorités ont accepté notre aide, mais pas celle de la Sécurité civile.

Lors du séisme de mai 2003 à Boumerdès, en Algérie, toutes les équipes de secours présentes ont été remerciées au bout de trois jours et priées de quitter le pays rapidement. Le président Abdelaziz Bouteflika ne voulait pas que nous soyons témoins du mécontentement de la population. Nous sommes un peu tributaires de la situation diplomatique. Nous devons malheureusement l’accepter.

Dans le cas du Maroc, pensez-vous que votre aide était nécessaire ?

On nous dit que certains villages n’ont encore vu aucune équipe de secours. Je ne peux pas le vérifier. Les besoins sont probablement couverts par les équipes qui ont été acceptées. Aussi terrible soit-il, ce tremblement de terre n’est pas de l’ampleur de celui qui a fait plus de 50 000 morts en Turquie cet hiver.

Les autorités marocaines ont probablement voulu éviter un engorgement des secours comme celui qu’elles ont connu lors du séisme d’Al Hoceima, survenu dans la nuit du 23 au 24 février 2004.

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Si toutes les équipes qui se sont manifestées auprès de l’Organisation des Nations unies avaient été acceptées, 3 000 à 3 500 personnes auraient dû se rendre sur place du jour au lendemain, or il est clair que l’aéroport de Marrakech n’a pas les capacités nécessaires pour accueillir si vite autant d’avions. Il aurait également fallu beaucoup de camions pour amener tous ces secouristes dans les villages sinistrés, qui se trouvent à trois heures de route de Marrakech. C’est forcément très compliqué, mais je pense que les autorités marocaines auraient pu accepter un peu plus d’aide de la part des pays européens, quelques heures après le séisme.

Le Monde

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