Alors que la première édition du Meilleur flan pâtissier s’est tenue à Lyon le 10 avril dernier, ce dessert français a plus que jamais le vent en poupe. Parfois comparé au pastel de nata portugais, son petit goût vanillé est pourtant incomparable, jusqu’à donner envie à certains becs sucrés de trouver LE meilleur flan.
Alors, s’il y a vraiment une «flan mania», ne serait-ce pas le moment de se demander à quoi tient la popularité de ce classique de la pâtisserie française?
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Le flan, un incontournable de la pâtisserie
À lui seul, le flan pâtissier incarne quelque chose du retour à l’enfance. Déjà présent au Moyen Âge, il a traversé les époques sans perdre de son aura. Pour Mori Yoshida, pâtissier dont le flan trône sans cesse dans les classements des amateurs, «le flan est un gâteau classique de la pâtisserie».
Giovanni Bianco, dont le flan a été élu «meilleur flan de Paris et d’Île-de-France» en 2019, va même plus loin: «Une boulangerie sans flan, c’est un peu curieux à mon sens. C’est le dessert le plus facile à réaliser. Avec quatre ingrédients, une casserole et un fouet on y parvient. […] Il est nécessaire d’attirer le client avec des produits qu’il connaît, qu’il repère immédiatement en passant devant la boutique. Et le flan est un produit phare de la boulangerie-pâtisserie.»
Si le flan est un dessert «facile à réaliser», cela pourrait expliquer la raison pour laquelle tout le monde s’en empare, de l’amateur au professionnel. De plus, la simplicité apparente de son élaboration permet aux boulangeries-pâtisseries de profiter d’une recette universelle, pour se l’approprier le plus efficacement possible.
Pour Giovanni Bianco, la popularité du flan tient aussi à son ADN très identifié: «Aujourd’hui, ça fait quatre ans que le flan est revenu sur le devant de la scène. Ça n’est pas près de s’arrêter, car il y a eu mille déclinaisons possibles, mais la recette à la vanille est et restera la plus authentique aux yeux des gens. Les consommateurs ont besoin de s’identifier avant d’essayer des variantes réalisées par des chefs étoilés.»
Un dessert accessible à tous les niveaux
C’est un fait, le flan est un dessert simple en tous points, à commencer par sa préparation. Pour Ju Chamalo, auteur de Mes Flans pâtissiers, «il reste aussi très “accessible” à faire à la maison, car un flan est composé principalement de lait, de crème, d’œufs, de sucre et de fécule (maïs ou pomme de terre). Normalement, ce sont des ingrédients que l’on a dans notre cuisine.»
Là où Ju Chamalo vante le réconfort de l’onctuosité et du crémeux, le pâtissier Mori Yoshida évoque sa facilité de préparation: «Je dirais que c’est une recette tellement simple qu’on la rate rarement.»
C’est peut-être la raison pour laquelle toutes les boulangeries s’attèlent aussi à proposer leur version. D’après Giovanni Bianco, «avec l’éclair, le flan reste accessible dans toutes les boulangeries. Les grands chefs pâtissiers aujourd’hui se sentent dans la nécessité de s’approprier ce produit en le rendant cher, ce que je trouve incroyable. Ils justifient le prix par leur notoriété, mais ils oublient l’essence même de ce produit: la simplicité. Le lait, la crème et les œufs sont des produits accessibles en matière de prix. Ils réussissent à faire payer très cher un produit qui ne leur coûte presque rien.»
«Il a été remis au goût du jour par certains pâtissiers et même par de grands chefs de palace qui sont aujourd’hui très médiatisés et suivis sur les réseaux sociaux.»
Un produit accessible, pas toujours vendu comme tel, qui reste pourtant selon Mori Yoshida «apprécié par tous les âges, à n’importe quel moment dans la journée, le matin pour le petit déjeuner ou à l’heure du goûter». Car oui, le goût du flan originel reste un goût universel, souvent peu clivant, qui n’est pas sans titiller l’enfant qui sommeille en nous: «Je pense qu’inconsciemment, les gens cherchent une part de nostalgie quand ils prennent une part de flan», ajoute Giovanni Bianco.
Il suffit de s’imaginer déguster sa meilleure part de flan en sortant de l’école pour réaliser que ce qui rend ce dessert accessible se tient également dans la facilité que l’on a de le manger. Avec autant d’éléments en sa faveur, il semble donc assez légitime que le flan ait une place de choix sur les étals des boulangeries-pâtisseries.
Une valeur sûre dans les pâtisseries
Giovanni Bianco, propriétaire de la boulangerie éponyme à Paris, l’annonce d’emblée: «Dans mon cas, le concours du flan a été un véritable booster d’activité, j’ai su en tirer profit.» Il faut dire qu’aujourd’hui, l’intérêt croissant porté pour ce dessert simple en apparence permet aux boulangeries de se réinventer ou de valoriser une recette traditionnelle.
De son côté, Mori Yoshida l’affirme: «Je n’ai jamais changé la recette du flan depuis l’ouverture de la boutique il y a dix ans. Je suis convaincu que la recette actuelle que j’ai élaborée en cherchant un goût universel est la meilleure de ma vie.»
Giovanni Bianco évoque quant à lui le flan comme une manière de se surpasser, en sélectionnant les ingrédients les plus qualitatifs. Car, on le sait, de l’autre côté de la boutique, tout est affaire de travail: «On a mis un produit encore plus en avant grâce au flan: la vanille. Il y a de nos jours des qualités de vanille incroyables qui permettent de sublimer le produit.»
Les pâtissiers et les pâtissières ont devant eux un boulevard, mais l’accessibilité du flan a réussi à contaminer d’autres domaines, comme le précise Giovanni Bianco: «Autour du flan, il s’est d’abord mis en place un concours, auprès du syndicat des boulangers du Grand Paris. Puis sont venus les réseaux sociaux avec Instagram et des influenceurs testeurs de flan.»
Les réseaux sociaux: au pays du flan
«Avec l’essor des réseaux sociaux, le flan a pris une belle place en matière d’image», affirme Ju Chamalo, dont le compte Instagram est actuellement suivi par près de 66.400 personnes. Et si le dessert a contribué à faire de la dégustation et du comparatif un genre à part entière sur les réseaux sociaux, ces derniers sont également des outils de relais pour les professionnels.
Ju Chamalo d’ajouter: «Pour moi, le flan a toujours été une valeur sûre dans les boulangeries mais depuis quelques années, il a été remis au goût du jour par certains pâtissiers et même par de grands chefs de palace qui sont aujourd’hui très médiatisés et suivis sur les réseaux sociaux.»
Mori Yoshida, dont le compte Instagram est aujourd’hui suivi par presque 63.000 personnes, confirme que dans la promotion d’un savoir-faire, internet a changé le métier: «Six mois après l’ouverture [de sa pâtisserie, ndlr], M. Michalak a publié une photo de mon flan sur Instagram en l’accompagnant d’un commentaire très favorable, alors que nous ne nous étions jamais rencontrés. Cela a déclenché la popularité du flan chez nous.»
Un exemple qui témoigne de l’impact concret que peuvent avoir les réseaux sociaux dans l’intérêt que l’on pourrait avoir pour le flan. Mais peut-on réellement dire qu’il s’agit d’un aliment «tendance»? Ju Chamalo nuance: «Je ne pense pas, les tendances ou les modes sont éphémères, le flan a toujours été présent et apprécié à mon sens. Il a juste été remis au goût du jour!»
Giovanni Bianco, s’il voit dans le flan une recette incontournable, semble, quant à lui, sentir une certaine «hype»: «Je pense que le flan a le vent en poupe, et que ça perdurera, car c’est un indémodable de la France. Tout le monde sait ce que c’est, et est curieux de le goûter.»
Il ne reste plus qu’à se (re)faire un avis sur la question en ouvrant la porte de la pâtisserie la plus proche!
À découvrir:
Giovanni Bianco, 49, rue Chardon Lagache 75016 Paris
Mori Yoshida, 65, avenue de Breteuil 75007 Paris
Mes Flans pâtissiers, Ju Chamalo, Aimery Chemin, La Martinière, mars 2022